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Eaux chimiquement surchargées : l’Europe s’inquiète
par Valérie Xhonneux - 8 septembre 2011

L’Agence européenne de l’environnement (AEE) a publié un rapport pointant les nouveaux défis de la pollution des eaux de surface européennes et souterraines par les substances chimiques. La contamination par les métaux lourds, les polluants organiques persistants mais aussi les médicaments et les nanomatériaux pose de nombreuses questions....

Les substances chimiques font partie intrinsèque de notre vie quotidienne : produits de soins corporels, médicaments, production agricole n’en sont que quelques exemples. Si les dizaines de milliers de substances disponibles sur le marché européen amènent des bénéfices à la société, elles sont aussi sources de nombreux questionnements. Parmi eux : la contamination généralisée de nos cours d’eau et nos océans par des substances qui présentent des impacts sur l’environnement - et les services qu’il nous rend - mais aussi sur notre santé (n’hésitez pas à relire ces articles).

Les premières alertes datent des années 50 et 60, époque à laquelle la contamination importante des mammifères marins par des polluants tels que les PCBs ou le DDT et ses métabolites a été observée. 50 ans plus tard, la situation reste préoccupante : une étude du Joint research center de la Commission européenne a cherché 60 substances dans 122 rivières et 164 points d’eau souterraine. Résultats : 60% des rivières analysées et 25% des eaux souterraines cumulaient l’ensemble des substances recherchées. Près d’un tiers de ces nappes contenaient un pesticide dépassant la norme européenne de 0.1 microgramme par litre. Aux premiers rangs de ces substances chimiques arrivent, dans les rivières, un tensio-actif (acide nonylphenoxyacetic), un anti-corrosif (benzotriazole) et un antiépileptique (carbamazepine), tandis qu’un antalgique (ibuprofen), un antibiotique (sulfamethoxazole) et un herbicide (isoproturon) figurent à très hautes doses dans les eaux souterraines.

L’arsenal législatif européen a pourtant été largement étoffé depuis les premiers constats de pollution : la directive IPPC, l’interdiction d’utilisation du tributylétain, la directive Environmental Quality standards, le règlement REACH, la directive cadre sur l’eau, le registre « European pollutant release and transfer », etc. Ces textes ont pour ambition de réduire les émissions de substances dangereuses à la source, ainsi que de mieux informer et de conférer plus de responsabilités aux industriels dans le cas du règlement. Mais plusieurs enjeux émergeant y sont considérés de manière insuffisante, comme par exemple les nanomatériaux, les médicaments ou les cosmétiques. Par ailleurs, leur mise en oeuvre est souvent trop lente, et les objectifs à atteindre pas toujours suffisament ambitieux au regard des enjeux.

L’agence européenne recommande de réduire à la source ces substances dangereuses, notamment en encourageant la chimie verte et en instaurant une première législation européenne dans ce secteur. Dans le cas des médicaments, cette recommandation de limitation à la source des émissions est renforcée par un appel identique de l’Organisation mondiale de la santé dans son rapport « Pharmaceuticals in drinking water ». Les pistes d’actions sont nombreuses, et passent tant par des mesures de sensibilisation à l’élimination des restes de médicaments par des voies adéquates (et non en s’en débarassant dans les toilettes ou les poubelles) tout en veillant à mettre en place des structures de récupération de ces médicaments périmés.

L’AEE préconise également de mieux considérer les effets cocktails potentiels de ces différentes substances combinées dans un même espace aquatique, ainsi que l’influence des changements climatiques sur les comportements de ces substances toxiques dans notre environnement.

Le rapport complet est disponible ici (en anglais uniquement)