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Vie active - Alimentation - Comprendre
Accro à la malbouffe ou ascète centenaire ?
par Alain Geerts - 19 mai 2013

Deux recherches menées sur des rats de laboratoire montrent, l’une, que la « Junk Food » ou « suralimentation » provoquerait la même dépendance que la drogue et l’autre, que manger moins permettrait de vivre plus longtemps et en meilleure santé. Interpellant si l’on considère lucidement nos habitudes alimentaires contemporaines, non ?

La « JUNK FOOD » : une véritable addiction qui pousse à l’obésité

La « Junk Food » ou « suralimentation » provoquerait la même dépendance que la drogue, selon une étude présentée à la « Neuroscience Conference » (Chicago) et publiée dans l’édition on line de Nature Neuroscience. Des scientifiques du Scripps Research Institute ont montré pour la première fois que les mêmes mécanismes moléculaires qui poussent à la toxicomanie expliquent une alimentation compulsive, poussant à l’obésité.

Réalisée par deux scientifiques Paul Kenny et Paul Johnson, de l’Institut de recherche Scripps à Jupiter, Floride (Californie) cette étude met en évidence le caractère addictif d’une alimentation rapide type fast food. Des rats nourris de manière régulière par de la nourriture grasse ont en effet développé un comportement de dépendance semblable à la dépendance à l’héroïne.

L’accoutumance à une « suralimentation » : Les chercheurs ont divisé les rats en deux groupes, un groupe nourri avec un régime alimentaire sain de bonne capacité nutritive, l’autre groupe nourri par des quantités illimitées d’aliments de type fast food, gâteaux sous vide etc… Les chercheurs ont constaté, que pour le second groupe, le centre du plaisir dans le cerveau devient de moins en moins sensible à la teneur en graisse des aliments et demande davantage d’aliments pour être stimulé. Les rats se mettent à manger de manière compulsive, en absorbant deux fois plus de calories que le premier groupe, et deviennent rapidement obèses.

L’accoutumance à une suralimentation est étonnamment rapide : Après seulement cinq jours de régime de « junk-food », les rats perdent le contrôle de leur alimentation, déclare Paul Kenny. « Un symptôme typique de la toxicomanie ».


Les chercheurs ont également utilisé des électrodes
pour stimuler les centres du plaisir dans le cerveau des deux groupes de rats. Les rats pouvaient contrôler leur quantité de stimulation en courant sur une roue. Plus ils couraient, la stimulation était importante. Durant cette expérience, les rats dépendants à l’alimentation de mauvaise qualité, ont couru bien plus que les rats alimentés normalement.

Le phénomène de dépendance dans le cerveau persiste pendant des semaines, même après reprise d’un poids normal par les rats concernés.

Johnson et Kenny ont ensuite étudié les mécanismes moléculaires sous-jacents qui pourraient expliquer ces changements. En se concentrant sur un récepteur particulier du cerveau connu pour jouer un rôle important dans la vulnérabilité à la toxicomanie et à l’obésité - le récepteur D2 qui répond à la dopamine, ils ont démontré que la surconsommation d’aliments déclenche la dépendance dans les circuits de récompense du cerveau, entraînant le développement d’une consommation compulsive de nourriture. Les mêmes mécanismes sont communs à l’obésité et la toxicomanie ».
Ces données illustrent que la surconsommation d’aliments agréables au goût, peut devenir une dépendance selon les mêmes mécanismes que la consommation de drogues.« Sources : Eurekalert (AAAS The science Society) »Addiction-Like Reward Dysfunction and Compulsive Eating in Obese Rats : Role for Dopamine D2 Receptors” , Science News- Paul Johnson et Paul Kenny. « Society for Neuroscience Program. » "Neuroscience 2009 ’Conference. Octobre 17-21,2009. Chicago.

Mangeons moins pour vivre plus longtemps et en meilleure santé

Une équipe de recherche du Royaume-Uni vient de découvrir que nous pouvons prolonger notre espérance de vie en ingérant moins de calories chaque jour. Les résultats de cette étude, publiés dans la revue Science, montrent qu’une restriction calorique se traduit non seulement par une prolongation de la durée de vie, mais également par une meilleure santé, car cela nous permet d’éviter un grand nombre de maladies associées à l’âge.

L’équipe de recherche de l’University College London, au Royaume-Uni, de la Davis School of Gerontology de l’University of Southern California (USC) et de la Washington University School of Medicine à St Louis, aux États-Unis, a mené des tests de restriction calorique sur des rongeurs et a constaté que ces restrictions alimentaires avaient un impact important sur les voies moléculaires liées au processus de vieillissement.

Les résultats ont également montré que dans les organismes moins complexes, une limitation calorique pouvait doubler, voire tripler la durée de vie. Mais l’auteur principal de l’étude, le professeur Luigi Fontana de la faculté de médecine de l’université de Washington, déclarait que l’objectif premier de la recherche était d’améliorer notre qualité de vie et de nous aider à éviter les maladies liées au vieillissement.

« L’objectif de mes recherches n’est pas vraiment de prolonger la durée de vie jusqu’à 120 ou 130 ans », expliquait-il. « À l’heure actuelle, l’espérance moyenne de vie dans les pays occidentaux est d’environ 80 ans, mais la plupart des gens ne sont en bonne santé que jusqu’à 50 ans. Nous souhaitons utiliser ces découvertes sur la restriction calorique et d’autres interventions génétiques ou pharmacologiques connexes pour combler ce fossé de 30 ans entre l’espérance de vie et ’l’espérance de vie en bonne santé’. Cependant, en prolongeant la durée de vie en bonne santé, l’espérance de vie moyenne pourrait également augmenter jusqu’à 100 ans. »

L’équipe de recherche a réduit l’apport calorique des rongeurs de 10 à 50%, ce qui s’est traduit par une diminution de l’activité des voies impliquant un facteur de croissance analogue à l’insuline (IGF-1) et le glucose. Une telle réduction des calories a permis de considérablement augmenter la durée de vie des rongeurs, et de réduire leur susceptibilité aux maladies liées au vieillissement telles que le cancer, les maladies cardiovasculaires et les problèmes cognitifs.

« Environ 30% des animaux soumis à une restriction alimentaire décèdent à un âge avancé sans développer de maladies normalement liées à l’âge », déclarait le professeur Fontana. « En revanche, la grande majorité (94%) des animaux suivant un régime alimentaire normal développent des maladies telles que le cancer ou des maladies cardiaques et en décèdent. Chez 30% à 50% des animaux soumis à une restriction alimentaire ou présentant des mutations génétiques dans ces voies liées à l’âge, ’l’espérance de vie en bonne santé’ est similaire à la durée de vie. Ils finiront par mourir, mais ils ne tombent pas malades. »

La recherche est particulièrement pertinente au vu de l’augmentation fulgurante de l’obésité dans le monde occidental. Le surpoids ou l’obésité peuvent mener à des maladies graves telles que les maladies cardiovasculaires, le diabète et certains types de cancer. L’obésité infantile est un problème particulièrement inquiétant à une époque où des milliers d’enfants se nourrissent principalement de « malbouffe » (la bien connue « junk food ») qui pourrait entraîner des problèmes de santé chroniques et de surpoids à l’âge adulte.

D’après le professeur Fontana, les tendances alimentaires actuelles ne feront qu’augmenter, et non réduire, ce fossé de 30 ans entre l’espérance de vie et de vie en bonne santé. Notre espérance de vie pourrait également diminuer, étant donné que des milliers d’entre nous développent des maladies liées à une mauvaise alimentation pouvant être évitées, notamment le diabète de type 2.

Il pense cependant que si les nutritionnistes parviennent à comprendre quelle restriction calorique doit être appliquée pour prolonger l’espérance de vie et aider les personnes à rester en bonne santé, il sera possible de développer des médicaments qui influencent les voies affectées par les restrictions caloriques afin d’assurer la bonne santé des personnes alors qu’elles vieillissent.

Les conseils nutritionnels ont toujours été basés sur des données épidémiologiques, mais cette recherche montre que le point de vue moléculaire est également pertinent. « Nous évoluons de l’épidémiologie vers la biologie moléculaire. Nous savons que certains nutriments, associés à une consommation calorique plus faible, peuvent influencer l’IGF-1 ainsi que d’autres voies. Bientôt, nous serons en mesure d’utiliser ces connaissances pour aider les gens à vivre plus longtemps en meilleure santé. »

Pour de plus amples informations, consulter :

Revue Science

University College London

Washington University School of Medicine à St Louis

USC Davis School of Gerontology

Crédit photographique : © Ashe - Fotolia.com

© laurent hamels - Fotolia.com

Voir aussi :
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