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La France vers l'interdiction totale du Bisphénol A - Santé Environnement
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Notre environnement - Agents chimiques
La France vers l’interdiction totale du Bisphénol A
par Valérie Xhonneux - 13 octobre 2011

Alors que l’interdiction de mise sur le marché européen de biberons contenant du Bisphénol A est entrée en vigueur, la France va plus loin et vient de voter l’interdiction pure et simple de cette substance en 2014 suite à la publication par l’Agence nationale française de sécurité sanitaire (Anses, l’ex-Afssa) de deux rapports explorant les effets du bisphénol A sur l’être humain et les animaux.

La France a décidé de bouger sur les enjeux de santé-environnemental – et on ne peut que saluer cette volonté. L’étude réalisée par l’ANSES fait l’objet de deux rapports : « Effets sanitaires du bisphénol A » et « Connaissances relatives aux usages du bisphénol A », résumés dans un dossier de presse disponible ici. Cette étude a identifié près d’une soixantaine de secteurs d’activités utilisateurs de bisphénol A en France. La liste de produits susceptibles d’en contenir est impressionnante : conserves ou bouteilles en plastique, lunettes et lentilles de contact, CD et DVD, emballages alimentaires, optiques de phare et pare-chocs, articles de sport, appareils médicaux, revêtements de sol, vernis et peintures, encres d’imprimerie, etc.

Les experts confirment ces effets du bisphénol démontré sur l’animal ou/et sur l’homme (plus rarement par manque d’études). L’extrapolation des animaux à l’homme est toujours complexe, dépendant de nombreux facteurs. Cependant, les études animales constituent autant de signaux d’alertes. Voici l’ensemble des effets potentiels du bisphénol A sur les animaux et/ou sur l’homme (source : docbuzz) :

Effets sur le système reproducteur mâle
- Altération de la production spermatique,
- Diminution des concentrations plasmatiques de testostérone,
- Modification du comportement sexuel.

Effets sur le système reproducteur femelle
- diminution du nombre d’ovocytes après stimulation ovarienne et altération de la qualité des ovocytes collectés,
- Augmentation de la survenue de kystes ovariens,
- Apparition d’hyperplasies de l’endomètre,
- Avancement de l’âge de la puberté lors d’expositions prénatale et post-natale,
- Effets sur l’axe hypothalamo-hypophysaire-gonadotrope due à une exposition in utero ou post-natale précoce entraînant des variations des taux dřhormones sexuelles et de l’expression des récepteurs de ces hormones.

Effets sur le développement cérébral
- Modifications du profil de neurodifférenciation,
- Des altérations des systèmes aminergique et glutamatergique,
- Des modifications de l’expression des récepteurs aux oestrogènes α et β,
- Modifications du comportement maternel

Effets sur le métabolisme lipidique et glucidique et le système cardio-vasculaire
- Accroissement des pathologies cardiovasculaires (maladies coronariennes) et du diabète,
- Augmentation de la lipidémie,
- Tendance à la surcharge pondérale.

Effets sur la thyroïde
- Antagoniste des hormones thyroïdiennes

Effets sur le système immunitaire
- induction d’un profil prédisposant à l’allergie

Effets sur l’intestin
- L’effet du BPA sur l’inflammation et la perméabilité intestinale est suspecté

Cancérogénécité
- Accélération de la maturation architecturale de la glande mammaire à l’âge adulte
- Développement de lésions hyperplasiques intracanalaires
- Effet suspecté :augmentation de la susceptibilité des glandes mammaires à développer ultérieurement des tumeurs mammaires

Les effets de ce perturbateur du système endocrinien ont été mis en évidence à des doses ingérées très inférieures aux doses règlementaires européennes ! Et ce, de manière bien plus importante à certaines périodes de la vie : l’ANSES reconnait dans son rapport que la période la plus sensible est celle de la gestation et que la priorité est d’empêcher la contamination du fœtus.

Pour le Réseau environnement santé (RES), une telle réévaluation de la DJA (dose journalière admissible) revient de fait à interdire l’utilisation du BPA en priorité dans les matériaux susceptibles de contaminer l’homme : boîtes de conserve, canettes de boisson, petit électroménager de cuisine et autres usages de contact alimentaire, matériel médical… «  L’actuelle DJA a servi jusqu’à présent de rempart à l’industrie agro-alimentaire contre toute politique de substitution du BPA et de fin de non-recevoir à nos interpellations » déclare Yannick Vicaire, chargé de mission chimie-procédés, «  nous demandons à l’industrie d’anticiper l’inéluctable évolution réglementaire. Les alternatives existent ; tout retard serait injustifiable au vu des enjeux sanitaires pour le fœtus et le nourrisson ».

La situation est suffisamment sérieuse pour que l’Anses qui parle du remplacement du bisphénol A comme d’un «  objectif prioritaire » ait jugé bon de lancer un appel à contributions sur les produits de substitution.
Dans son rapport, l’ANSES maintient sa recommandation de protéger prioritairement les populations les plus sensibles par un étiquetage systématique des produits susceptibles de contenir du BPA. De plus, le RES demande aux autorités publiques de tirer toutes les conclusions de ces nouveaux rapports : l’extension de l’interdiction du BPA à échéance d’un an , une campagne de communication auprès des femmes enceintes et des acteurs de santé publique, ainsi qu’un accompagnement des associations professionnelles dans le choix et l’évaluation des alternatives. Par ailleurs, l’enjeu des mois à venir sera d’obtenir une réévaluation de l’agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA) de sa position sur le BPA et de revoir, à la baisse, les doses de références utilisées dans la règlementation européenne, visiblement non adaptées à la protection de la santé humaine.

L’industrie, de son côté, met en doute les conclusions de l’Anses et proposerait un délai de trois ans avant que le bisphénol A ne soit remplacé. Mais est-il bien raisonnable d’attendre trois ans comme l’avance l’industrie sous couvert d’impossibilité matérielle de produire un substitut ? Est-ce là réagir de façon responsable quand l’agence nationale compétente parle d’« objectif prioritaire » ? [1] (voir aussi cet article sur le site de Rue89 :Le bisphénol A bientôt interdit, c’est le retour à la bougie ? )

Donnons un conseil juridique gratuit aux professionnels du secteur. Depuis le 27 septembre au moins (des doutes existaient depuis bien avant) et la publication des rapports, il n’est plus possible d’avancer la défense de l’ignorance. Ceux qui diffuseront la substance toxique le feront sciemment. L’élément intentionnel requis par le droit sera constitué et les qualifications pénales d’usage dans des affaires semblables seront susceptibles d’être mobilisées avec succès.
Seront responsables les producteurs des emballages, les acteurs de l’industrie agro-alimentaire choisissant d’y conserver leurs aliments, et les distributeurs - allant du grossiste au détaillant. Seront autant responsables les personnes morales que les dirigeants personnes physiques de ces entités. Intenter une action, ne serait-ce que de principe, ne sera pas chose difficile : il suffit de faire l’acquisition de produits contaminés (certains numéros figurant sur les emballages fournissent des indications utiles) et de conserver ses tickets de caisse [2].

Nous venons juste d’apprendre que l’Assemblée a voté ce mercredi 12 octobre à l’unanimité une proposition de loi PS soutenue par le gouvernement interdisant le bisphénol A dans les contenants alimentaires à compter de 2014, mais dès 2013 pour les contenants alimentaires de produits destinés aux enfants de moins de 3 ans. Les lobbys de l’industrie alimentaire ont donc remporté une petite victoire (ce sera dans 2 ans et 3 mois) que la « restriction » à 2013 ne vient que peu ternir...

Les jours du BPA sont donc comptés en France. Mais que va faire la Belgique en la matière ?

notes :

[1Nicolas GARDERES, Avocat au Barreau de Paris et Matthieu DELMAS, Avocat aux Barreaux de Paris et de New-York, publiée dans « Libération » le vendredi 7 octobre 2011

[2(ibidem)